dimanche 26 octobre 2008

La vision du Tchouang-tseu par Billeter


Livre de chevet - Tchouang Tseu est un philosophe* de l'antiquité chinoise. Il serait mort aux environs de 300 ans avant notre ère. Ses écrits sont regroupés dans ce que l'on appelle "le" Tchouang-tseu. Jean-François Billeter, sinologue critique, a prononcé quatre leçons au Collège de France en 2000 qui sont retranscrites dans le petit ouvrage édité par Allia. Jean-François Billeter nous fait redécouvrir la charge critique de ce philosophe que ses commentateurs avait occultée tout un temps :
  • le fonctionnement des choses (Pour le philosophe chinois il faut concevoir le corps comme l'ensemble de nos forces connues et inconnues "celui qui sait ne parle pas, celui qui parle ne sait pas" a t'on eu coutume de traduire cette maxime de Tchouang Tseu , mais J.F Billeter revient sur cette traduction qu'il estime erronée et propose plutôt celle-ci : "quand on perçoit, on ne parle pas, quand on parle, on ne perçoit pas" illustration d'une traduction malheureuse...)
  • les régimes de l'activité (J-F Billeter soutient la thèse selon laquelle l'oeuvre de Tchouang Tseu est une description de son expérience, il va chercher sa pensée philosophique)
  • une apologie de la confusion (au travers d'un dialogue entre Yen Houei et Confucius "J'ai fait des progrès, je puis rester assis dans l'oubli , je laisse aller mes membres, je congédie la vue et l'ouïe, je perds conscience de moi même et des choses; je suis complètement désentravé : voilà ce que j'appelle être assis dans l'oubli... Te voilà devenu un sage dit Confucius.)
  • un paradigme de la subjectivité (Billeter dit encore : le Tchouang-tseu est un ouvrage déconcertant et difficile, mal traduit et mal commenté notamment par Kouo Siang au début, qui "a transformé une pensée de l'autonomie radicale, de l'indépendance de la personne, du refus de la servitude et de la domination en une apologie du dégagement, de l'indifférence morale, d'une forme de désinvolture qui permettait aux aristocrates de leur temps de servir les pouvoirs en place malgré le dégoût qu'ils leur inspiraient. Ils ont désamorcé la charge critique du Tchouang-tseu pour en tirer une justification de la démission devant le pouvoir. C'est ainsi que le Tchouang-tseu est devenu la consolation, la compensation spirituelle des aristocrates lettrés... et aurait peut être disparu sans cela".)

* pour J-F Billeter un philosophe désigne "l'auteur d'un système, un homme qui pense par lui même. en prenant pour objet de sa pensée l'expérience qu'il a de lui même, des autres et du monde ; qui s'informe et médite ce que pensent ou de ce qu'ont pensé avant lui les philosophes ; qui est conscient des pièges que tend le langage et en fait par conséquent un usage critique".

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